Littérature de comptoir

1. Eloge à celles et ceux qui ne retournent pas vers les emmerdes.

C’est toujours dans un bar que je m’exprime le mieux. Alors, tenancier, écoute-moi bien. Tu m’as déjà vu par le passé, j’suis Julian et j’ai quelques douilles à raconter. Ne me prends pas pour Bukowski, je ne suis pas écrivain, juste un mec qui se prend pour un artiste. Aujourd’hui, j’ai envie de faire un éloge, alors sers-moi un verre d’abord.

À ceux qui ne retournent pas vers les emmerdes, ou la merde tout court !

Ça m’est venu d’une discussion, avec une femme, sur une autre femme que j’aimais à la folie. Elle me disait que cette femme reviendrait, parce que l’amour, ça se termine vraiment quand c’est fini pour de bon. Et tu peux me croire, mon vieux, c’est terminé entre elle et moi. J’suis juste hanté par son corps et par nos promesses. Mon cœur s’est détourné d’elle depuis bien longtemps. Il n’y a que mon entrejambe qui me rappelle à elle. Parfois, on pense que c’est encore de l’amour, alors que c’est juste une dernière baise qu’on veut.

On revient pour le potentiel, rien de plus. Comme un toxico à la recherche de sa première dose et de la sensation qui l’accompagne.

À cette femme qui me parlait de celle que jadis j’aimais, j’ai répondu qu’à toutes ces emmerdes, je préférais le bonheur. Même si cette ancienne amoureuse est encore ancrée dans ma peau, je n’ai aucunement envie de revivre le silence, les insultes, le mépris, la manipulation… Non, pas tout ça. Je rêve mieux. Je désire être heureux.

En plus, je sais ce qu’est le bonheur, ce qu’est l’amour. Elle me rendait dingue, mais je n’étais pas fou d’elle. Ce n’était pas moi qui l’aimais, mais ma mauvaise folie.

Encore une bière, mon vieux !

À la santé de ceux qui rêvent plus grand, qui n’ont pas besoin de toutes ces merdes pour se sentir vivants, qui savent que le bonheur n’est pas absolu, mais qu’il ne doit pas se compromettre avec des horreurs pour autant. Ceux qui comprennent que revenir sans cesse vers un connard ou une connasse, ce n’est pas s’aimer, que la passion n’a pas besoin d’être toxique, qu’on peut aimer follement sans se faire trop mal.

J’envie ces gens. J’ai l’impression qu’ils sont plus forts que moi. À 45 ans bien tassé que j’ai déjà, je pourrais encore lui parler d’amour pour qu’elle ouvre ses cuisses. Rien de plus. Et finir ma vie comme ça. Sauf si l’amour redébarque entre-temps. Je deviens vieux, je sais, mais on a tous droit à une autre chance, non ?

Allez, à plus, mon vieux. Je vais pisser mes bières chez moi.

La plume perchée de Sébastian Blysk

Par Sebastian Blysk

Ecrivain, et travailleur social (ou inversement)

Auteur d’Une Petit longue déclaration, recueil publié le 9 mars 2022
aux éditions Frison-Roche Belles-lettres.

“Les Fragments d’un chagrin” est sorti le 29 janvier 2025 aux éditions Lys Bleu

Je suis dans la rédaction d’un roman.

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